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Cardiologie

Dose de charge avant PCI pour SCA ST- : le ticagrélor serait supérieur au prasugrel

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Dose de charge avant PCI pour SCA ST- : le ticagrélor serait supérieur au prasugrel

Chez les patients à haut risque ou à risque intermédiaire qui présentent un syndrome coronaire aigu (SCA) sans sus-décalage du segment ST (SCA ST-), les recommandations préconisent d’administrer, avant la réalisation de toute procédure interventionnelle coronaire percutanée (PCI), une dose de charge de ticagrélor ou de prasugrel.

II est en effet essentiel d’obtenir le meilleur blocage possible du récepteur plaquettaire P2Y12-ADP au moment de la procédure afin de prévenir la survenue d’événements cardiovasculaires indésirables.

Il faut cependant souligner qu’à ce jour aucune étude n’a comparé ces 2 stratégies qui, malgré leur action rapide, ne bloquent l’activité plaquettaire qu’au bout de 1 à 6 heures.

C’est ce qui a conduit L. Bonello et coll. à tenter de savoir si, avant la réalisation d’une PCI, une dose de charge de ticagrélor censée réaliser une inhibition optimale des récepteurs plaquettaires, se montrerait supérieure à une dose de charge de prasugrel pour prévenir l’altération myocardique (myonécrose) périprocédurale.

L’étude prospective et randomisée a porté sur 213 patients hospitalisés pour un SCA ST- et qui devaient bénéficier d’une PCI.

Après randomisation, ils ont été assignés à recevoir soit une dose de charge de 180 mg de ticagrélor donnée aussitôt que possible après l’admission et avant la procédure, soit une dose de charge de 60 mg de prasugrel administrée au moment de la PCI.

Le critère principal était le taux de myonécrose périprocédurale défini par une augmentation du taux de la troponine supérieure à 5 fois celui du 99e percentile chez les patients à troponine négative et par une augmentation de 20 % du taux de troponine chez les patients à troponine positive.

A l’état basal, les caractéristiques cliniques des 2 groupes de patients étaient semblables (p = 0,2). Il en était de même des caractéristiques procédurales y compris en ce qui concerne le nombre des artères coronaires traitées et des stents implantés.

Les patients du groupe prasugrel ont nécessité plus souvent une PCI en urgence (p = 0,001) pratiquée du fait de la récidive de l’ischémie dans l’intervalle compris entre l’admission et la PCI programmée.

Comparés aux patients du groupe prasugrel, les patients du groupe ticagrélor ont présenté significativement moins de myonécrose périprocédurale (19,8 % vs 38,3 %; p = 0,03). Avec un suivi d’un mois, le taux d’événements cardiovasculaires adverses majeurs (à savoir, décès d’origine cardiovasculaire, infarctus du myocarde, revascularisation urgente, accident vasculaire cérébral) et le taux de saignements définis par un score > 2 du Bleeding Academic Research Consortium étaient faibles et semblables dans les 2 groupes.

En conclusion, chez les patients qui présentent un SCA ST-, une dose de charge de 180 mg de ticagrélor administrée aussi précocement que possible et avant la PCI, s’avère plus efficace qu’une dose de charge de 60 mg de prasugrel administrée au moment de la PCI, en prévention de la survenue d’une altération myocardique (myonécrose) périprocédurale.

Référence

Bonello L et coll. : Comparison of Ticagrelor Versus Prasugrel to Prevent Periprocedural Myonecrosis in Acute Coronary Syndromes. Am J Cardiol 2015 ; 116 : 339-343.

 

En pratique de ville, que valent les scores de prédiction de l’embolie pulmonaire ?

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En pratique de ville, que valent les scores de prédiction de l’embolie pulmonaire ?

S’il est un diagnostic difficile en médecine générale, c’est bien celui d’embolie pulmonaire. Par précaution, de nombreux patients sont dirigés vers les urgences et certains travaux montrent que seulement 10 à 15 % des cas adressés pour suspicion d’embolie pulmonaire en sont véritablement.

Des modèles de prédiction du diagnostic d’embolie pulmonaire ont été élaborés, mais ils l’ont été le plus souvent dans des services d’urgences hospitaliers et sont difficilement applicables à la pratique quotidienne d’un médecin de ville. Dix modèles prédictifs ont ainsi été recensés par une équipe hollandaise dans l’objectif de les faire évaluer par des médecins « du premier recours », médecins généralistes qui reçoivent en premier lieu ces patients et ne disposent pas du même plateau technique que les hôpitaux. M.T. Hendriksen et coll. en ont retenu seulement 5 qu’ils estimaient utilisables par des médecins de ville : le score de Wells original, le score de Wells modifié, le score de Wells simplifié, le score de Genève révisé et le score de Genève révisé simplifié.

Score de Wells simplifié pour la sensibilité et score de Genève révisé simplifié pour la spécificité

La capacité de discrimination de ces 5 scores est sensiblement comparable. Il se dégage toutefois un léger avantage pour les scores de Wells en termes de sécurité. C’est le score de Wells simplifié qui obtient la meilleure sensibilité (96 %) et le score de Genève révisé simplifié la moins bonne (88 %). C’est ce dernier en revanche qui obtient la meilleure spécificité (53 %) alors que le score de Genève révisé est le moins spécifique (48 %). Mais quelque soit le test utilisé, 3 patients sur 10 sont classés à tort comme ayant une faible probabilité d’embolie pulmonaire qui ne sera diagnostiquée qu’après que le patient ait été adressé aux urgences.

Les auteurs conseillent aux médecins généralistes d’utiliser plutôt la version simplifiée du score de Wells, combinée avec le dosage des D-dimères. Une embolie pulmonaire peut alors être exclue dans 4 cas sur 10 patients suspects, avec un taux d’échec acceptable, inférieur à 2 %.

Score simplifié de Wells

Score de Genève modifié simplifié

Références

Hendriksen M.T. et coll. : Diagnostic prediction models for suspected pulmonary embolism: systematic review and independent external validation in primary care. BMJ 2015;351:h4438

 

Angor réfractaire : la voie du sinus

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Angor réfractaire : la voie du sinus

Malgré les progrès constants des techniques de revascularisation percutanée (RPC) ou chirurgicale, l'angor réfractaire est aujourd'hui une pathologie en expansion, du fait du vieillissement de la population et plus particulièrement de la diminution de la mortalité des coronariens traités.

Que proposer à ces patients handicapés par leur angor, malgré un traitement médical bien conduit et dont les lésions coronariennes ne sont pas accessibles à une RPC ou à un pontage ?

Une méthode imaginée en 1935

Les cardiologues interventionnistes ne manquant ni d'imagination, ni d'audace, ni de culture médicale, une équipe américano-israélienne a eu l'idée de remettre au goût du jour une technique mise au point par Beck et coll. en 1955 à la suite de travaux conduits chez le chien en 1935 à New York. Il s'agissait alors de réduire chirurgicalement par une ligature partielle le diamètre du sinus coronaire (qui draine une large partie du retour veineux myocardique) en espérant ainsi augmenter grâce à la congestion veineuse la libération d'oxygène au myocarde. Sur ces bases physiopathologiques plus qu'incertaines et en ajoutant à la ligature chirurgicale diverses techniques comme l'abrasion épicardique, la greffe de graisse médiastinale et l'application de poudre d'amiante (!), Beck et son équipe ont opérés 295 patients avec des résultats, chez les survivants, qu'il jugeait satisfaisant (32 % de disparition complète ou quasi complète des douleurs). Mais l'absence de groupe contrôle et surtout l'avènement du pontage aorto-coronarien ont progressivement conduit à l'abandon de cette méthode originale de traitement (de même que des autres interventions proposées à la fin des années 50, comme la ligature de l'artère mammaire interne expérimentée en 1957).

Des angors totalement réfractaires

Le groupe de Stefan Verheye (Boston) et de Shmuel Banai (Tel Aviv) a utilisé pour réduire le débit dans le sinus coronaire un dispositif à ballonnet implantable par cathétérisme droit le Coronary Sinus Reducer de Néovasc (voir figure). Un premier essai non randomisé portant sur 15 malades ayant montré des résultats positifs significatifs en 2007, S Verheye et coll. ont entrepris l'étude COSIRA (pour Coronary Sinus Reducer for Treatment of Refractory Angina). Il s'agit d'un essai randomisé en double aveugle contrôlé par une procédure factice entrepris dans 11 centres de cardiologie (1).

Les patients inclus devraient répondre aux caractéristiques suivantes:

  • souffrir d'un angor de classe III ou IV de la classification de la Canadian Cardiovascular Society (CCS) malgré un traitement médical aux doses maximum tolérées (avec plus ou moins associés des bêta-bloquants, des anticalciques, du nicorandil, de l'ivabradine, des dérivés nitrés);
  • avoir une ischémie réversible et une fraction d'éjection ventriculaire supérieure à 25 %;
  • ne pas être justiciables d'une revascularisation selon l'avis du staff hospitalier au vu d'une coronarographie récente;
  • avoir une anatomie du sinus coronaire compatible avec la pose du Reducer.

Ces malades ont été randomisés entre la mise en place du Reducer et une intervention factice. Les patients ignoraient le groupe auquel ils avaient été assignés (pour garantir l'aveugle, les sujets portaient un casque musical ou bénéficiaient d'une sédation consciente pour empêcher qu'ils entendent les conversations des médecins durant la procédure!) et si, bien sûr, les opérateurs ne l'ignoraient pas, les médecins devant juger des résultats ne le connaissaient pas.

Le critère principal de jugement était le pourcentage de patients s'étant améliorés d'au moins deux classes CCS au 6ème mois.

Cent quatre patients ont été inclus dans l'essai entre 2010 et 2013. Agés en moyenne de 67,8 ans, une large majorité d'entre eux avaient déjà présenté un infarctus du myocarde (IDM) et plus de 7 sur 10 avaient bénéficié d'un pontage ou d'une RPC. Le Reducer a pu être mis en place chez 50 patients sur 52. Sa pose a été compliquée d'un IDM et d'un épisode d'angor instable (contre un angor instable dans le groupe contrôle).

Une amélioration significative de la symptomatologie

Sur le critère principal de jugement, le traitement a été un succès avec 35 % de patients s'étant améliorés de plus de deux classes CCS à 6 mois contre 15 % avec le traitement factice (p = 0,02). De plus pour 72 % des malades du groupe Reducer, le classement CCS a diminué d'au moins une classe contre 42 % dans le groupe contrôle (p = 0,003). Enfin la qualité de vie évaluée par des indices ad hoc s'est significativement plus améliorée dans le groupe Reducer. En revanche les différences constatées en faveur du traitement actif en ce qui concerne l'évolution de l'index de motion systolique mesuré lors d'échographies sous dobutamine réalisées avant et après traitement et la durée d'effort possible n'ont pas atteints le seuil de signification statistique.

Un infarctus est survenu dans le groupe traitement actif (lors de la pose) contre 3 chez les témoins. Aucun patient du groupe traité n'est décédé dans les 6 mois contre un dans le groupe contrôle.

Quel destin pour le Reducer ?

Cette étude particulièrement rigoureuse dans sa méthodologie (notamment parce qu’elle comportait une procédure factice pour neutraliser un éventuel effet placebo) a donc démontré, sur un petit nombre de patients, l'effet positif du Reducer sur les symptômes angineux dans l'angor réfractaire. L'éditorialiste du New England Journal of Medicine regrette toutefois qu'une vérification du caractère aveugle de l'étude n'ait pas été réalisée (par exemple en demandant aux patients à quel groupe ils pensaient avoir été assignés)(2). De plus l'effectif de COSIRA était encore trop limité pour tirer des conclusions définitives sur son efficacité éventuelle sur des critères objectifs et donc sur l'ischémie elle-même ou sur la morbi-mortalité. Ce devrait être, en plus de la confirmation de ces résultats encore préliminaires, l'un des buts des prochains essais qui seront conduits sur cette nouvelle technique prometteuse en mettant en œuvre des techniques comme l'IRM ou la TEP pour évaluer l'ischémie.

Il reste également à préciser le mécanisme par lequel le Reducer améliorerait l'angor, l'hypothèse d'une redistribution du flux sanguin des zones épicardiques les moins ischémiques aux zones endocardiques ischémiques étant actuellement privilégiée.

Il est cependant encore trop tôt pour pouvoir déterminer si le rétrécissement du sinus coronaire deviendra un traitement "classique" de l'angor réfractaire ou si il sera rangé au magasin des accessoires comme de nombreuses techniques jugées prometteuses puis abandonnées.

 

Références

1) Verheye S et coll.: Efficacy of a device to narrow the coronary Sinus in refractory angina. N Engl J Med., 2015; 372: 519-527.

2) Granger C et coll. : Potential relief for refractory angina. N Engl J Med., 2015; 372:566-567.

Un seul dosage de troponine T-ultrasensible pour le diagnostic d’infarctus aux urgences ?

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Un seul dosage de troponine T-ultrasensible pour le diagnostic d’infarctus aux urgences ?

Les douleurs thoraciques sont à l’origine de 5 à 10 % des consultations aux urgences. Or, seule une faible proportion d’entre elles est en lien avec un infarctus du myocarde. L’examen clinique, les antécédents, l’ECG et le dosage de la troponine permettent rarement d’éliminer formellement un infarctus et pratiquement 8 patients sur 10 sont gardés en observation ou pour un complément d’examens. Le dosage de la troponine T-ultrasensible devrait supplanter désormais celui de la troponine standard et améliorer ainsi le diagnostic. Il est recommandé de la doser lors de l’admission et de répéter le dosage 3 heures plus tard.

Une équipe du Royaume Uni a entrepris d’évaluer l’intérêt d’un dosage unique de la troponine T-ultrasensible lors de l’exploration étiologique d’une douleur thoracique. Pour ce faire, il a été procédé à une méta-analyse de 23 études, incluant au total près de 9 500 patients.

Les auteurs ont retenu plus précisément les seuils de troponine T-ultrasensible de 14 mg/l et celui de 3 à 5 mg/l. Le seuil de 14 mg/l donne au test une sensibilité de 89,5 % et une spécificité de 77,1 %, celui de 3-5 mg/l une sensibilité de 97,4 % et une spécificité de 42,4 %. Ceci signifie que, si l’on considère que 21 % des patients souffrant de douleurs thoraciques présentent un infarctus du myocarde (ce qui est la prévalence moyenne dans les travaux considérés), le seuil de 14 mg/l conduirait à en négliger 2 à 3 (faux négatifs), alors que 18 patients sur les 79 autres seraient considérés comme présentant un infarctus (faux positifs). En revanche, le seuil de 3 à 5 mg/l laisserait passer moins de 1 cas d’infarctus, mais 46 patients indemnes seraient « testés » positifs.

Cette stratégie comportant un seul dosage de troponine T- ultrasensible ne peut, soulignent les auteurs, que s’intégrer dans une démarche diagnostique d’ensemble et n’est pas adaptée aux patients qui se présentent aux urgences moins de 3 heures après le début de leur douleur thoracique.

 

Références

Zhelev Z et coll.: Diagnostic accuracy of single baseline measurement of Elecsys Troponin T high-sensitive assay for diagnosis of acute myocardial infarction in emergency department: systematic review and meta-analysis

BMJ 2015;350:h15.

 

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